Une méthode pour augmenter l’efficacité de la gouvernance du Comité de Direction

Dans le monde des affaires et des associations, l’efficacité opérationnelle est une quête permanente pour les équipes de direction. Au cœur de cette démarche, la gouvernance du comité de direction joue un rôle crucial, servant de pierre angulaire pour atteindre des niveaux supérieurs de performance et d’engagement. En adoptant des stratégies de délégation et de responsabilisation, ces comités peuvent non seulement optimiser leurs processus décisionnels, mais également favoriser un environnement de travail plus dynamique et impliqué. Par le biais d’une gouvernance éclairée et adaptative, les équipes opérationnelles se voient confier davantage de responsabilités, encourageant ainsi l’innovation et l’autonomie, des éléments essentiels pour naviguer dans le paysage complexe et en constante évolution du monde professionnel moderne.

 

Contexte : pourquoi la gouvernance de votre Comité de Direction peut utilement évoluer ?

 

Divers facteurs incitent les directions générales à prioriser et accélérer la transformation de la gouvernance du comité de direction, ainsi que les processus de pilotage et de prise de décision au sein de leur organisation. Ces facteurs incluent notamment : l’évolution des attentes des collaborateurs, les exigences réglementaires croissantes, et la nécessité d’une adaptation rapide à un environnement de marché en constante évolution.

 

1.Des collaborateurs plus exigeants sur la qualité de vie au travail, la communication bienveillante et inclusive, l’humilité et l’exemplarité du management, la reconnaissance et la clarté des responsabilités qui leurs sont données : sans un minimum de délégation structurées et explicite, les salariés ou indépendants ont tendance à ne plus être fidèles à leur employeur et à quitter l’entreprise assez rapidement. La motivation liée au salaire, à la mission de l’entreprise ou à son prestige ne suffisent plus désormais ;

 

2.Une complexité croissante des opérations dans une société de plus en plus régulée par des normes médicales, sociales et environnementales, des contraintes économiques et juridiques sur le respect de critères extra financiers. A titre d’exemple, la nouvelle directive CSRD, ou Corporate Sustainability Reporting Directive, est une directive publiée par l’Union Européenne qui rassemble un ensemble de mesures ambitieuses visant à améliorer les flux financiers en faveur des activités durables. Ceci renforce le besoin de délégation pour pouvoir s’adapter rapidement  ;

 

3. Des facteurs de décision de plus en plus volatiles, qui nécessitent de passer d’un paradigme d’expertise à celui de l’adaptation toujours plus rapide devant des contextes marché incertains voire ambigus. Il est de plus en plus important de différencier les modes de décision selon que la situation est considérée comme compliquée (niveau d’expertise élevé) ou complexe (aucune solution n’existe à ce jour pour traiter le sujet) ;


4. Des dirigeants qui n’acceptent plus de voir leur charge mentale augmenter sans cesse et un temps de plus en plus grand passé en réunions (parfois de crise pour traiter des enjeux court terme) plutôt qu’en réflexion stratégique à long terme (ce qui est normalement leur rôle premier : celui d’orienter et d’imaginer l’avenir)…

 

Enjeux : l’impact critique de la gouvernance du comité de direction sur la performance globale

 

Sans action volontariste des leaders de l’organisation, les risques de baisse des performances sociales, organisationnelles et in fine économiques, augmentent à une vitesse de plus en plus grande. 

Les premières entreprises à souffrir sont celles qui n’ont pas un modèle économique suffisamment récurrent pour lesquelles la baisse de la satisfaction client a un très fort impact sur les résultats financiers. 

Les premiers signes avant-coureurs sont une accélération du taux de départ des employés, des résultats dégradés lors des enquêtes de satisfaction internes et externes, enfin la baisse du chiffre d’affaires ou la dégradation des marges…

Les enjeux majeurs de durabilité nécessitent de faire évoluer les pratiques afin de coller aux évolutions sociales et managériales attendues par les collaborateurs.

La responsabilité du comité de pilotage de l’entreprise est donc de rester en veille et d’agir avant que les résultats et l’impact de l’organisation ne se dégradent trop. Détecter les signaux faibles, comme on dit, en mettant en place une évolution progressive du cadre de fonctionnement. Car la différence entre un monde prévisible et un monde complexe est d’observer attentivement, et d’imaginer des manières nouvelles de manager rendues possibles par des technologies sociales émergentes. 

Comme le dit Edgar Morin, philosophe à qui le thème est cher, pour agir dans la complexité, il faut modifier nos schémas mentaux, changer de paradigme en passant de la pensée simplifiante à la pensée complexe. Morin précise que “La pensée complexe ne méprise pas ce qui est simple, elle critique la simplification”. 

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Mise en action : 10 pistes pour faire évoluer la gouvernance du Comité de Direction 

 

« La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent », une maxime souvent attribuée à Albert Einstein, capture parfaitement les défis auxquels sont confrontées de nombreuses entreprises.

Dans cette optique, sous l’impulsion de la direction générale, les équipes de direction se transforment en véritables incubateurs d’innovation en matière de gouvernance. Elles explorent activement de nouvelles approches de management et d’organisation interne.

Cet espace d’innovation applique ses expérimentations directement à la gouvernance du comité de direction, testant de nouveaux modèles structurels pour améliorer l’efficacité des réunions, optimiser les processus décisionnels, faciliter le partage d’informations, ainsi que l’acquisition, l’analyse et le traitement rapide des données.

Voici les 10 premières pistes sur lesquelles travaillent en général les équipes de gouvernance du comité de direction, qui se réforment pour devenir plus réactives et plus adaptatives :

1 – Différencier les structures de réunions pour traiter les sujets complexes des sujets compliqués. Les derniers peuvent utiliser des structures de réunion ou d’idéation classiques quand les premières vont utiliser des structures d’intelligence collective. En cas de complexité, l’intelligence collective devient un véritable atout pour avancer avec de nouvelles pratiques d’innovation managériale qui permettent de tester et d’itérer rapidement des idées et des solutions. Le livre d’Olivier Zara sur L’Excellence Décisionnelle est très éclairant sur ce sujet ;

 

2. Clarifier les rôles au sein de l’équipe en rendant transparent et explicite (dans un outil collaboratif numérique) leur utilité et de quoi chaque rôle est redevable vis-à-vis de l’équipe. Cela permet que lorsqu’ une personne parle officiellement dans le rôle concerné, cela aie plus de poids (par exemple : “en tant que responsable du budget du projet, je crains que nous engagions des dépenses trop risquées en créant cet événement”) ;

 

3. Mettre en œuvre des rituels récurrents, structurés, facilités et donc efficients pour traiter des sujets opérationnels. Cette structuration permet d’ailleurs que l’animation ne repose ni sur une seule personne ni qu’elles soient les mêmes ; une pratique qui renforce la dynamique et l’inclusivité au sein de la gouvernance du comité de direction. 

 

4. Dédier des cérémonies à la réflexion, au bilan et à l’analyse de façon rétrospective du fonctionnement de l’équipe afin d’en tirer des hypothèses, de débattre des possibilités de faire différemment, d’établir des propositions nouvelles de fonctionnement et de les mettre en oeuvre avec agilité  ;

 

5. Tester ces nouveaux modes de décision ou de fonctionnement et demander ensuite à l’équipe un feedback pour en tirer des apprentissages ; ce processus est essentiel pour affiner et améliorer continuellement la gouvernance du comité de direction. En implémentant des cycles d’évaluation et de rétroaction, l’organisation peut identifier les stratégies les plus efficaces, repérer les zones nécessitant des ajustements et encourager une culture de l’amélioration continue. 

 

6. Créer des espaces de parole individuels ou collectifs afin de libérer les tensions et de partager des besoins, permettant ainsi d’accroître la confiance au sein de l’équipe en étant acceptés tel que nous sommes. La notion d’écoute prend ici une vraie dimension, car nous avons souvent l’impression de parler mais pas forcément d’être écoutés : réaliser des formations à l’écoute est une bonne solution pour en prendre conscience et faire évoluer les comportements ;

 

7. Clarifier la mission et la vision stratégique de l’organisation ou de l’équipe pour permettre à chaque personne dans ses rôles de décider rapidement sur son périmètres de décision ou pour faire une prise d’avis du collectif en étant éclairé par ce cap ;


8 . Travailler sur la sécurité psychologique en établissant un cadre relationnel défini ensemble par tous les membres de l’équipe et régissant les comportements, les interactions et communications au sein de l’équipe en s’inspirant des valeurs que l’entreprise prône ;

 

9. Promouvoir une culture de l’excellence opérationnelle en responsabilisant les acteurs de terrain sur l’optimisation permanente des processus de l’entreprise.

Par exemple, le lean management vise à optimiser la gestion des ressources pour garantir les performances d’une entreprise. Cette méthode repose sur une meilleure gestion des 3M : Muda (supprimer ce qui n’a pas de valeur), Mura (éviter la variabilité et les irrégularités) et Muri (éradiquer les gaspillages par excès). En effet, la clé du succès des équipes est souvent dans la discipline de l’exécution, rendue possible par la motivation des équipes responsabilisées sur l’optimisation permanente des processus et la disparition des processus de contrôle exercés par des structures extérieures (comme le dit si bien Jean-François Zobrist « C’est celui qui fait qui sait ») ;

 

10. Itérer en partageant les écarts entre les attentes de chacun et le fonctionnement perçu, afin de disposer d’un cadre décisionnel et managérial évolutif et dynamique, à l’écoute des parties prenantes et tourné vers l’amélioration continue. Il est très apprécié de mettre en œuvre des micro changements réguliers plutôt que de grandes réorganisations éprouvantes et déstabilisantes, souvent obsolètes au moment de leur déploiement. Toyota avec son fameux TPS (Toyota Production System « better done than perfect ») est au final une bonne déclinaison opérationnelle de notre proverbe français « le mieux est l’ennemi du bien ».

 

Voici un petit retour d’expérience sur les équipes dirigeantes que nous accompagnons, ainsi que quelques points stratégiques pour l’optimisation de la gouvernance du comité de direction. N’hésitez pas à nous solliciter pour échanger sur vos doutes, difficultés, besoins ou volonté d’optimisation de vos modes de fonctionnement managériaux. Nous expérimentons tout ou partie de cela chez un nombre grandissant de clients, très divers en termes de taille, de secteur, d’interculturalité, et nous constatons dans les faits que ça marche réellement. 

 

 

 

 

“Assertive People in Responsive Organisations” : c’est le résultat que vise AC Mentoring au travers de ses services. Cela signifie des personnes bien dans leur poste, se sentant à leur place, performantes, avec des rôles bien clairs et un cadre décisionnel explicite. Leur bien être se ressent et influe positivement sur l’activité qui se développe en même temps que la satisfaction client. Et les résultats financiers et extra financiers qui deviennent de plus en plus positifs.

Le cabinet aide les personnes au travers d’un accompagnement en coaching, mentoring, formation, facilitation et conseil RH sur 4 thématiques : le leadership (empowerment), le management, la gouvernance et le pilotage de l’organisation, les sujets RH / Carrière. Créé en 2011, AC Mentoring a travaillé avec de nombreuses organisations de secteurs très divers et accompagné des milliers de personnes. Ses valeurs phares sont la joie, l’entraide, l’authenticité, le don et la loyauté.

 

Sources images : 
Photo de JESHOOTS.COM sur
Unsplash

Co-auteurs : Claire CHEDEVILLE, Franck TOURTOIS et Cyril OGÉE

Coach, thérapeute ou Mentor : quelles sont les différentes formes et postures d’accompagnement ?

 

Quand on parle d’accompagnement, de quoi parle-t-on ? De coaching, de mentoring, de thérapie, de formation, de conseil… etc. ?

A l’heure où l’accompagnement se développe, il n’est pas toujours évident de savoir ce qui se cache derrière ces termes et quelles sont les postures associées. Nous vous proposons dans cet article de faire un peu de lumière sur ce sujet, pour mieux vous aider à comprendre, et donc à choisir, la forme d’accompagnement qui vous semble adaptée à votre besoin.

 

Par exemple :

  • Je veux apprendre rapidement de nouvelles choses sur un thème cible : la formation semble répondre à mon besoin.
  • Je me sens bloqué-e par des traumatismes du passé : la thérapie brève peut m’aider.
  • Je souhaite me/nous challenger et atteindre un objectif : le coaching pourra m’être utile.
  • Je souhaite développer dans mon équipe la co-construction par l’intelligence collective : la facilitation semble être une réponse pertinente.
  • Je souhaite être conseillé-e sur ma vision et bénéficier de retours d’expériences : le consulting et/ou le mentoring sont des services à tester.

En effet, quand on a besoin d’être aidé, la relation d’aide peut être différente selon le besoin que vous rencontrez : guérir une souffrance liée à des événements passés, dépasser une difficulté passagère, se préparer à faire évoluer des comportements pour atteindre un objectif dans un futur proche.

 

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Lorsque nous avons besoin d’analyser le passé :


La thérapie brève
est généralement conseillée pour soigner en quelques mois des blessures issues du passé, et c’est souvent une étape utile avant d’entamer une démarche pour améliorer son présent ou se projeter dans l’avenir, s’il s’avère que cela vous bloque dans votre action.

 

Lorsque nous avons besoin de regarder vers l’avenir :


La formation, le conseil, le mentoring et la facilitation
sont souvent utilisés pour vous aider à résoudre un problème actuel ou atteindre un objectif à court terme.

Le coaching peut aussi y être utile, et il est très pertinent pour modifier des choses dans votre façon d’agir identifiées comme nécessaires pour changer votre avenir et atteindre les objectifs que vous vous donnez à plus long terme. Il peut suivre une prestation de conseil aidant à définir la vision afin de vous permettre d’exécuter une stratégie pour atteindre cette vision.

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Quels sont les différents types d’accompagnements possibles ?

Voyons maintenant quelle définition peut être donnée à chaque type d’accompagnement :

1. La formation :

La formation est un processus d’apprentissage structuré et organisé, généralement dispensé par un formateur qualifié. Elle vise à transmettre des connaissances spécifiques et à développer des compétences dans un domaine particulier.


2. Le conseil :

Le conseil (ou consulting) est une activité qui fournit des conseils et des recommandations d’experts à des organisations ou à des individus pour les aider à résoudre des problèmes spécifiques ou à atteindre des objectifs particuliers. Les consultants utilisent leur expertise, leurs connaissances approfondies et leur expérience pour analyser la situation, identifier les défis et les opportunités, et formuler des recommandations stratégiques.


3. Le mentoring :

Le mentoring, lui, repose sur une relation de partage et de soutien entre une personne plus expérimentée (le mentor) et une personne moins expérimentée (le mentoré). Le mentor partage ses connaissances, son expérience et ses conseils sur le thème concerné pour aider le mentoré dans son développement personnel et professionnel. Le mentorat vise à accélérer l’apprentissage du mentoré en lui offrant un accompagnement personnalisé. Le mentor agit comme un guide, offrant des encouragements et des orientations. Il peut partager des leçons tirées de son propre parcours, aider à développer des compétences spécifiques. Le mentorat favorise la croissance du mentoré en lui offrant un modèle de rôle et un soutien bienveillant. On peut dire que le mentor agit comme un formateur / consultant, adaptant ses retours d’expérience à l’actualité rencontrée par la personne.


4. Le coaching :

Le coaching est un processus interactif où un coach aide une personne à atteindre ses objectifs personnels ou professionnels. Le coach utilise des techniques de questionnement puissant et d’écoute active pour stimuler la réflexion et favoriser les prises de conscience. Plutôt que de donner des réponses directes, le coach encourage la personne à trouver ses propres solutions et à prendre des décisions éclairées. Le coaching aide les individus à explorer leurs talents et leurs capacités, à lever les blocages, à surmonter les obstacles et à passer à l’action et à progresser vers ses aspirations. Dans le coaching d’équipe, le coach travaille avec le collectif pour améliorer la collaboration, la communication et les performances collectives. L’objectif est de renforcer la dynamique de l’équipe, de résoudre les conflits, d’améliorer la prise de décision et de favoriser un environnement de travail harmonieux et productif.


5. La facilitation :

La facilitation, quant à elle, est un processus de gestion de groupe qui vise à encourager la participation active, la collaboration et la résolution de problèmes. Un facilitateur crée un environnement propice à l’expression des idées et à la prise de décision collective. Il veille à ce que tous les membres du groupe se sentent entendus et respectés, et utilise des techniques de gestion de groupe pour favoriser l’engagement et la créativité. Le facilitateur ou la facilitatrice pose des questions ouvertes, guide les discussions et aide le groupe à atteindre ses objectifs spécifiques. La facilitation est souvent utilisée lors de réunions, de séminaires ou d’ateliers pour assurer une participation équitable, agréable et productive de tous les participants.

 

6. La thérapie brève :

Une thérapie brève est un processus professionnel qui vise à aider les individus à résoudre rapidement des problèmes psychologiques, émotionnels ou relationnels souvent liés à une blessure passée, et à favoriser leur bien-être. Elle est généralement dispensée par une ou un psychothérapeute. L’objectif principal de la thérapie brève est d’aider les personnes à mieux comprendre leurs pensées, leurs émotions, leurs comportements et leurs schémas de fonctionnement. Elle offre un espace sécurisé et confidentiel où les individus peuvent explorer leurs difficultés, leurs préoccupations et leurs expériences de vie, et travailler à résoudre les problèmes qui les affectent. Cette forme d’accompagnement est utile à tous, car nous avons toujours des ombres du passé qui bloque ou limite notre mise en action (pour les cas de maladies mentales, les thérapies longues (analyses de plusieurs années) sont traitées dans le cadre d’un parcours médical par des professionnels de la santé mentale, psychologues ou psychiatres).

Quelles postures associées à chaque accompagnements ?

Ces formes d’accompagnement s’accompagnent en général de postures également différentes :

    • La posture est haute, qui est celle du sachant : formateur, mentor, consultant, thérapeute.
    • La posture est basse, neutre pourrait-on dire, laisse émerger les idées et actions sans les influencer : coach, facilitateur (même si le facilitateur est le garant du respect du processus structuré de l’interaction sur lequel il a une posture haute : on lui demande l’autorisation de prendre la parole ou pour interagir. C’est le « chef » du processus utilisé pendant la cérémonie. Cette posture favorise l’autonomie et l’engagement de l’individu. Mais également une posture de challenge : elle ou il encourage la personne accompagnée à sortir de sa zone de confort et à relever des défis.
    • La posture de soutien : utilisée par tous les types d’accompagnement : l’accompagnateur/accompagnatrice offre un espace sûr et bienveillant où la personne accompagnée peut s’exprimer librement, sans jugement ni critique. Il favorise un climat de confiance et de respect mutuel, où la personne accompagnée peut se sentir en sécurité pour explorer ses idées, ses émotions et ses préoccupations.
    • La posture de responsabilisation : l’accompagnement est conditionné par l’engagement de la personne accompagnée, sa présence et la réalisation des actions et tâches entre deux sessions. L’accompagnateur encourage la personne accompagnée à prendre la responsabilité de ses actions, de ses choix et de son propre développement.

Conclusion :


Il est important de noter que ces postures peuvent souvent se chevaucher et se combiner en fonction des besoins spécifiques de la personne accompagnée et du contexte dans lequel se déroule l’accompagnement
. Chaque posture a ses propres avantages et peut contribuer de manière significative à la croissance, au développement et à la réalisation du potentiel individuel. Selon les besoins et les contextes spécifiques, ces activités peuvent être utilisées individuellement ou collectivement, seules ou combinées, pour offrir un soutien complet et adapté aux personnes et aux entreprises.

Les termes peuvent également varier d’une personne à l’autre et d’un domaine à l’autre. Cependant, comprendre les différences fondamentales entre la thérapie, le coaching, la facilitation, le mentoring, la formation et le consulting peut aider à choisir l’approche la plus appropriée en fonction des circonstances spécifiques et des objectifs visés.

Dans tous les cas, si vous hésitez, demandez-nous, nous proposons au sein de notre collectif toutes les formes d’accompagnement avec des spécialistes qui se complètent et travaillent de concert pour aider au mieux nos clients. C’est la raison pour laquelle nous favorisons beaucoup l’accompagnement à plusieurs, qu’il soit collectif ou individuel.

 

 

Ecoutez maintenant le retour d’un de nos mentorés : Hervé RABY 👇

 

 

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Replacer l’Homme au cœur de l’attention : Chronique d’un sauvetage industriel

 

 

Voici la fiche de lecture du livre de Nicolas Jeanson « Replacer l’Homme au cœur de l’attention » sur l’histoire du retournement d’une situation difficile d’une entreprise grâce à la mise en place d’un management par la confiance et l’autonomie.  Le livre explique comment Nicolas Jeanson a sauvé une usine de produits pharmaceutiques du désastre, en restaurant la confiance des clients et des employés pour retrouver l’équilibre économique indispensable à la pérennité de l’entreprise. 

Nicolas Jeanson a exercé pendant plusieurs décennies des responsabilités de DRH et de directeur de sites industriels appartenant au secteur automobile. Il est ensuite devenu consultant en accompagnement de dirigeants, principalement sur le thème du management, rôle dans lequel il a accompagné cette entreprise du secteur pharmaceutique. Tout au long de son parcours professionnel, Nicolas Jeanson a été guidé par le souci constant de répondre à 2 impératifs simultanés : obtenir de bons résultats économiques, condition sine qua non pour pérenniser l’organisation, et respecter les personnes et de leur bien-être au travail. 

Appelé dans le cadre d’une mission de management de transition, il a été confronté à une dégradation alarmante des résultats, non pas en raison de pertes d’activité ou de clients, mais d’un passage général en mode dégradé dû à des coûts élevés de non-qualité, de multiples retards de livraison et un absentéisme supérieur à la moyenne du secteur. Ce qui devait être une mission intermédiaire de 4 mois a été prolongée d’une année, le temps de redresser les résultats et surtout de rétablir la confiance entre les opérateurs et leur manager. 

Dans ce livre, il exprime ses convictions personnelles, notamment sa surprise de constater que les solutions de management sain que l’on pourrait penser être des pratiques courantes dans les entreprises sont finalement rarement appliquées. Car si les hommes et les femmes qui occupent des postes de direction ne manquent pas de compétences techniques, il leur manque souvent la capacité de « réparer ce qui a été endommagé », à oublier leur rôle professionnel pour se recentrer sur l’humain, et établir de véritables connexions avec leurs collègues et collaborateurs, dépassant ainsi les egos qui bloquent souvent les évolutions.

Il est intéressant de noter la simplicité avec laquelle il observe et écoute pour comprendre les gens, leur poser des questions et les faire réfléchir aux conséquences du maintien de leurs habitudes. Il raconte comment il a pris conscience de la situation et a travaillé sur les nombreuses failles qui sont apparues dans l’usine. Sa force est d’utiliser ses valeurs humanistes pour amener progressivement les employés à se remettre en question et à s’impliquer dans un sauvetage de l’entreprise. Il démontre que le changement de comportement ne peut se faire que lorsque les individus voient le sens de leur action, comprennent comment ils contribuent au succès ou à l’échec, mesurent leur impact concrètement.

Ce livre montre aussi comment, en période d’incertitude, il est important de différencier les notions d’erreur, d’échec et de faute. Là où la faute démontre une volonté de saboter où une incompétence liée à une répétition d’erreurs identiques, l’échec est la conséquence d’erreurs qui sont utiles pour tester des approches, expérimenter des nouvelles façons de faire quand on est dans l’ambiguïté. Quand on est dans le noir, il est compliqué de sortir de la pièce sans faire des tentatives pour trouver la porte. 

Bien évidemment, chaque échec appelle une analyse et un apprentissage (via une culture du feedback) afin d’arrêter rapidement ce qui ne fonctionne pas pour expérimenter de nouvelles choses. Il est aussi très utile de libérer la parole dans l’organisation, de créer des espaces d’échanges afin de discuter d’écarts de vue, de tensions avec la réalité souhaitée, et de coconstruire des hypothèses qui donneront lieu à des décisions d’expérimentation.  

Ainsi, cette pratique Agile permettra d’avancer à tâtons, et de faire évoluer progressivement le fonctionnement de l’organisation, sans faire de restructurations, qui ressemblent souvent à des révolutions (où les têtes tombent bien souvent) et qui créent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent. Faire confiance au système humain, lui laisser la liberté d’agir au sein d’un cadre connu et respecté, permet de faire progresser et évoluer les organisations plus sûrement que des grandes décisions managériales souvent perçues comme brutales et inhumaines. 

Reconnaître qu’on ne sait pas est le premier pas pour les dirigeants, accepter de faire confiance via un lâcher prise courageux en est le deuxième. « C’est celui qui fait qui sait » aurait dit David Marquet pour qui descendre l’autorité là où se trouve l’information (c’est‐à‐dire chez les opérateurs) est plus efficace que de la remonter là où se trouve l’autorité.

Nicolas Jeanson pose clairement le cadre, les règles du jeu et les valeurs humanistes qui sont les siennes. Cette contrainte peut être douloureuse pour certains acteurs qui, refusant de coopérer aux nouvelles règles, s’excluent eux-mêmes du processus de travail. 

Il n’hésite pas alors à exercer son autorité dans son rôle de directeur de site pour remplacer les collaborateurs en question. Puis un climat de confiance se réinstalle naturellement dans l’usine. Et les résultats sont objectivement visibles rapidement : réduction des erreurs de conduite de ligne, reprise des progrès de productivité, amélioration du taux de satisfaction clients. 

Avec le sourire partagé et retrouvé, une détente au niveau des relations interpersonnelles émerge. L’amélioration des résultats suivront et permettront de renouer avec une politique de rémunération qui valorise les efforts et le progrès. Une boucle vertueuse est ainsi réinitiée qui étonne d’abord les partenaires sociaux habitués à la confrontation.

Alors que l’emploi devient souvent une variable d’ajustement des coûts avec l’arrivée grandissante de la robotisation et de l’automatisation, il est indispensable de voir plus loin et de ne pas oublier que les robots vont de pair avec l’humanisation du travail. Ce témoignage récent datant des années 2010 démontre la capacité des organisations à conduire le changement quand elles replacent l’humain au centre de l’attention et des processus managériaux. 

Face à l’émergence d’un monde de plus en plus VICA (volatile, incertain, complexe, ambigu) qui nécessitent des prises de décision de plus en plus complexes, ce récit nous rappelle qu’il est primordial de ne pas oublier l’humain. Il est essentiel de passer du temps avec les collaborateurs chaque jour (pour les observer, les écouter et essayer de comprendre ce qu’ils font et comment ils le font) et de dire ce que l’on fait et de faire ce que l’on dit : être exemplaire dans n’est pas un bon moyen de réussir, c’est le seul moyen pour créer de la confiance. Albert Einstein (1879 – 1955) disait à ce propos « L’exemple n’est pas une autre façon d’enseigner, c’est la seule façon d’enseigner. » 

La Fondation Olivier Lecerf (1929-2006), ex-président de Lafarge de 1974 à 1989 a été créée pour honorer et faire connaître des réalisations, des travaux ou des ouvrages qui s’inscrivent dans la tradition de l’humanisme entrepreneurial. Cette Fondation a remis son Prix de l’année 2014 à Nicolas Jeanson pour son ouvrage « Replacer l’homme au cœur de l’attention. Chronique d’un sauvetage industriel ». 

C’est l’approche humaniste du management de Nicolas Jeanson, dont l’ouvrage donne un témoignage concret, qui est a été récompensé.

Le bien-vivre ensemble en entreprise est-il inhérent à la Gouvernance ?

 

« Gouverner c’est faire croire » – Machiavel

 

Qu’est-ce que c’est la gouvernance ?

La gouvernance est une notion floue et peu définie. Un anglicisme qui s’impose dès les années 90 et décrit une situation de gestion complexe d’organisation. Elle nécessiterait une forme de compromis à travers une redéfinition du modèle de gestion en prenant en compte des intérêts complexes et parfois contradictoires. Appliquée dans la sphère publique et pour des institutions comme l’ONU ou l’Union Européenne, la gouvernance sous-entend un modèle de bien vivre ensemble intégrant la dimension de négociation d’un modus operandi entre différentes parties prenantes.

 

La gestion de la complexité ou des intérêts contradictoires dans le privé

Dans la sphère privée, la notion de gouvernance est utilisée souvent en parlant des grandes sociétés multinationales. La gouvernance sert à concilier par exemple les intérêts parfois contradictoires entre les actionnaires et les gestionnaires, mais aussi à répondre à l’enjeu de la diversité. Il s’agit de la tension que rencontrent les grands groupes mondialisés entre la globalisation des standards et les process garantissant une forme de cohérence du groupe et la nécessaire adaptation aux logiques et impératifs locaux. Le modèle « glocal » think global act local serait une réponse un peu trop facile à cette injonction presque paradoxale, car les modes de fonctionnement sont toujours porteurs de sens et renvoient à un système de valeurs plus profond. La négociation proposée à travers la gouvernance du groupe serait ainsi une tentative de réconcilier des dilemmes, de trouver des formes de coopération hybrides répondant à ces postulats culturels sans oublier le rapport des forces entre la logique du siège et des filiales qui est inhérent à cette recherche des compromis.

 

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Identifier, comprendre et partager la raison d’être d’entreprise : un préalable pour une bonne gouvernance ?

 Les entreprises ne cessent de chercher la recette de la cohésion et de la stabilité d’une part et de la performance et de l’innovation d’autre part. La manière d’organiser cette gestion de l’entreprise passe aussi par la recherche de la bonne structure organisationnelle. Minzberg décrit 7 configurations organisationnelles voulant répondre à ces enjeux – dont mécaniste avec une forte technostructure et l’importance des process et standards mettant de l’huile dans les rouages, divisionnelle, donnant une grande autonomie à des entités spécialisées ou encore missionnaires qui mise sur l’importance de la culture comme principal élément normatif et fédérateur. Bien qu’il existe un choix prédominant de configuration adoptée par l’organisation, les gestionnaires essayent périodiquement de révolutionner son mode de fonctionnement. Qui n’a pas connu des centralisations (surtout quand le contexte de développement se crispait) ou de décentralisation quand on devait répondre à l’impératif de l’innovation et de l’adaptation aux marchés locaux ?

 

La mission difficile de concilier « think global » et « act local » dans des contextes culturellement différents n’est pas pour autant impossible, à condition de trouver un moyen de dessiner l’objectif commun. C’est là qu’intervient la raison d’être d’entreprise et l’impératif de pouvoir et savoir la partager avec toutes les parties prenantes. La gouvernance serait alors un moyen de dessiner le chemin commun, la mission de l’entreprise dans un cadre négocié et acceptable pour tous. Les relations entre le siège et les filiales vont notamment s’inscrire dans ce cadre négocié et en fonction de la gouvernance (ou bonne gouvernance) permettre ou pas de rééquilibrer les forces et les contributions. 

Ainsi une bonne gouvernance collaborative n’étoufferait pas la voix des filiales, leurs contributions ou initiatives qui permettraient à toute organisation de bénéficier de cette intelligence collective. Créer au sein du groupe un organe responsable de la transmission de ces initiatives est l’une des voies possibles, très souvent il prend forme de services « globaux » ayant comme objectif de négocier entre ces deux logiques du siège et des filiales. Institutionaliser ces flux envoie un message important aux protagonistes et incite à fluidifier les échanges.

 

Parfois de bonnes idées arrivent d’une contrainte locale prise en considération, à condition de l’entendre. Quand Danone a commencé à commercialiser de l’eau minérale au Mexique (Evian) les consommateurs mexicains, habitués à des boissons sucrées ne voyaient pas d’intérêt à dépenser de l’argent pour acheter de l’eau, de surcroit très chère.  Danone fidèle à sa raison d’être (promotion de la nourriture saine) ne pouvait pas accepter à vendre des sodas. C’est ainsi que les eaux aromatisées sont nées et devenues le Block Buster du groupe vendu dans le monde entier. Une réalité locale prise en considération a permis à l’ensemble du groupe de bénéficier d’une innovation insufflée par la contrainte.

 

Réconcilier les logiques divergentes, s’entendre sur les rôles des instances de gouvernance

Il arrive aussi que même si les parties prenantes se mettent d’accord sur la mission de l’entreprise, la compréhension des rôles de chacun peut s’avérer complexe et constituer un vrai obstacle pour la construction de la bonne gouvernance. C’est exactement ce qui est arrivé à l’occasion de la fusion Lafarge Holcim. Une fusion qui devait composer avec deux logiques décisionnelles et pratiques différentes de l’autorité. Le modèle de bien-vivre ensemble en Suisse repose sur la reconnaissance du principe de subsidiarité et de consensus.

Comme l’a décrit Pierre Robert dans son article : « La vision de l’autorité et de l’obéissance aux règles ne saurait être dissociée de la notion de parties prenantes. La subsidiarité impose ainsi la prise en compte des compétences des parties prenantes dans tout processus de décision ». « La hiérarchie et le pouvoir sont insuffisants, la décision ne sera acceptée que lorsque l’ensemble des avis aura été sollicité » la légitimité du décisionnaire repose sur sa capacité à embrasser l’ensemble des opinions. Ce n’est pas ce que Bruno Laffont, choisis pour porter la fusion en qualité de PDG, a compris. Dans la culture française, le consensus proche du compromis n’est pas la meilleure solution. Le décisionnaire doit répondre à la quête de la vérité – lire excellence, et celle-ci ne peut pas être le fruit d’un compromis « mou ». Très vite ainsi Bruno Laffont est écarté de son poste, comme le décrivait la presse suisse, à cause de ses comportements monarchiques ou il se trouverait le seul maître à bord.

 

On oublie souvent que derrière les organisations se cachent des postulats beaucoup plus profonds faisant appel à nos croyances, à notre conviction que le modèle de bien vivre ensemble repose sur quelques éléments non négociables.

 

Ces différences ressortent notamment très fortement à l’occasion des fusions, alliances, acquisitions. Le facteur culturel devient ainsi prépondérant dans la réussite ou l’échec de la coopération internationale. « Culture eats strategy for breakfast » disait Peter Drucker et sa non-prise en compte peut coûter très cher. La bonne gouvernance reposerait ainsi sur une prise en compte de modèles mentaux en œuvre et leur traduction dans un modus operandi négocié et acceptable par les parties prenantes.

 

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L’entreprise libérée a-t-elle entamé sa première mutation ? Quelles sont les conséquences sur le management ?

 

En 2014 (2015 pour la version française), Laloux, ancien consultant chez McKinsey, publie Reinventing Organizations, où il présente les « entreprises opales » comme le stade le plus évolué de l’entreprise libérée. Le regard de Laloux sur les organisations est porteur de trois idées majeures : l’autoorganisation (self-management) des individus et des équipes, à la manière des cellules et des organes qui ont leur fonctionnement autonome ; la prise en compte des individus dans toutes leurs facettes (wholeness), en intégrant autant que la raison, la force et la détermination actuellement valorisées, d’autres facettes comme la vulnérabilité, les émotions ou l’intuition ; une raison d’être évolutive (evolutionary purpose), qui se révèle en se mettant à l’écoute de ce que l’organisation veut devenir et servir, mais qui ne se définit pas a priori en vue de l’atteindre. Quels sont les conséquences de cette évolution sur la management d’aujourd’hui ?

Organisations « opales » : le nom moderne de l’entreprise libérée ? 

Selon Peter Drucker, « le management est différent du leadership, le management consiste à bien faire les choses, alors que le leadership consiste à faire les bonnes choses ».

Cette forme d’organisation repose sur moins de management, et plus de leadership. Voilà pourquoi Fréderic LALOUX parle de réinventer les organisations grâce au leadership dans son livre intitulé « Reinventing Organizations », référence des entreprises opales.

Selon l’auteur, qui a étudié en détail douze organisations pionnières pour la modernité de leur gouvernance, il est souhaitable de mettre en place une liberté de décision à tous les niveaux de l’organisation. La seule condition est que chacun s’engage à vérifier l’impact de sa décision sur les autres, en demandant à tous les acteurs concernés leur avis avant de mettre en œuvre l’action. Il analyse les grands stades d’évolution de la gouvernance depuis l’origine de l’Homme, en y associant des couleurs (inspiré par le modèle de la spirale dynamique). Les premières entreprises à devenir “opales” auront plus de chance de s’adapter rapidement. Là aussi, la définition de la raison d’être partagée de l’organisation est un préalable. L’organisation se fait en petites équipes autogouvernées comme Buurtzorg, une société de service à la personne ayant 14 000 collaborateurs, où les équipes de 10 infirmièr(e)s sont autonomes et travaillent en réseau avec les autres équipes. Le siège ne comprend qu’une cinquantaine de personnes seulement.

Buurtzorg, Patagonia, Morning Star, Sun Hydraulics Corporation, AES, RHD, Sogilis, Officience, W.L Gore (qui a créé le Goretex et fonctionne en auto-gouvernance depuis sa création dans les années 1950), et d’autres entreprises sont considérées comme appartenant à cette « mouvance opale ».

Dans les entreprises opales, les employés n’ont pas toujours de poste précis attitrés. Ils ont a minima une collection de rôles. Chez Morning Star, le travail est cyclique (il dépend de la saison de la récolte des tomates). Ainsi les définitions de rôles se font essentiellement sur un cycle annuel. Chaque rôle est défini par une « Collegue Letter of Understanding » qui est une description de mission personnelle (une fiche de rôle). Il n’est pas rare de voir une personne qui tient 20 rôles différents. Les personnes acquièrent de l’expérience avec les années et leurs collègues leurs attribuent ainsi des nouveaux rôles plus complexes ou plus nombreux. 

Des exemples vivants et français. 

Duc HA DUONG a fondé l’entreprise Officience en 2006 au Vietnam.  Cette société de services informatiques franco-vietnamienne compte aujourd’hui plus de 300 salariés. En 2013, l’entreprise fait le choix de devenir une tribu sans hiérarchie, sans managers, sur le mode des entreprises opales. Pourquoi ce choix ? À la suite des difficultés managériales rencontrées avec l’équipe locale au Vietnam, et pour faire face à la crise et unir leurs forces, ils éprouvent le besoin de comprendre les motivations profondes de chacun d’eux. Duc décide avec ses associés de définir la raison d’être. Sont cités le développement durable, la confiance et une vision du monde partagée par la « tribu ». Sont alors entérinés dans une charte les finalités suivantes : développer le Vietnam, encourager la mondialisation positive, créer de la valeur partagée, penser et agir durable et partager le savoir. Les associés décident de se séparer de certains managers qui ne partagent pas ces valeurs.  Ils étaient en fait à l’origine des problèmes en ayant un management très hiérarchique, accordant peu d’autonomie aux équipes, limitant l’innovation et surtout la prise des bonnes décisions. À la suite de la lecture du livre « Reinventing Organizations » de Frédéric LALOUX, Duc propose de simplifier l’organisation par la mise en place d’une hiérarchie basée sur le leadership. L’entreprise se redresse très rapidement, ce management libéré soulage les salariés, la hiérarchie leur pesait, ils s’engagent dans une culture commune.

Christophe BAILLON a fait pareil chez SOGILIS, l’entreprise qu’il a fondée en 2008. Ses logiciels sur-mesure tendent vers le zéro défaut avec un très faible coût de maintenance à long terme. Pourquoi ce choix d’un management libérant ? Car chez SOGILIS, les initiatives stratégiques viennent des employés, pas de la direction. Au démarrage, fruit d’une discussion entre salariés à la machine à café, l’idée de la vidéo automatique via un drone est approfondie. Les salariés lancent une campagne de financement via Kickstarter, avec succès. Constatant l’intérêt d’encourager les innovations pensées par les salariés, Christophe adopte un management libérant. Chacun prend les décisions adéquates après avoir consulté les personnes impactées. Pourquoi ce modèle d’organisation est-il disruptif et innovant ? Autonomie, efficience, passion, enthousiasme du client, épanouissement des salariés, recrutement par les équipes, entretiens individuels, Lean. Ce sont les équipes qui ont poussé l’entreprise à investir à Grenoble, Lyon, Melbourne, Paris et même à créer de nouvelles pousses : Squadrone Système (drones), Startup Maker (studio de startups) et Hionos (autopilotes pour drones civils).

D’autres exemples sont disponibles dans le livre de Yves CAVAREC, « L’entreprise du vivre ensemble ».

Un exemple d’Orient qui infuse jusqu’en Occident : de la pyramide aux amibes ou « Amoeba Management » 

Une méthode également très innovante est celle du management par amibe. Kazuo Inamori, le fondateur de l’entreprise Kyocera et dirigeant des entreprises KDDI Corporation puis Japan Airlines, a mis au point pour son groupe cette méthode appelée « Amoeba Management. »

Cette méthode innovante s’appuie sur 2 principes du groupe KYOCERA : « Agir correctement en tant qu’être humain » et « utiliser le potentiel de leadership de tous les employés ». Cette philosophie couplée, d’une part avec une gestion par micro-organisations simple et précise et, d’autre part, avec une distribution de la responsabilité en petites unités autoportantes – telles des amibes – peut aider les grandes organisations à atteindre un degré élevé de flexibilité et de perception du marché. Ce modèle qui consiste donc à diviser l’organisation en petites unités opérationnelles animées par un leader qui a la charge de construire avec son équipe les objectifs et les plans d’actions de « l’amibe ». 

Les « amibes » ont pour principe de fonctionner en équipe, sur le mode collaboratif nécessitant la participation de tous aux efforts collectifs, qui contribuent au succès de l’amibe. Dans ce modèle, chaque collaborateur joue un rôle essentiel, et s’engage volontairement à cogérer « l’amibe ».

Ce système est intéressant car il vient d’un autre continent : l’Asie. On retrouve nos cercles autonomes (« amibes »), et un management partagé entre tous les collaborateurs. Son fondateur est un leader libérateur, ancien moine bouddhiste qui fait reposer son management sur une « philosophie » basée sur l’altruisme et sur « ce qui semble juste en tant qu’être humain ». 

Ce principe est appelé « Le management par tous » est particulièrement efficaces dans des environnements dynamiques et hautement concurrentiels, ces principes ont été reconnus par la « Harvard Business Review » et ont déjà été adoptés avec succès par plus de 400 entreprises à travers le monde.

Appelé au chevet de JAL en faillite, il a sauvé cette entreprise qui cumule aujourd’hui plus de bénéfices que toutes les autres compagnies aériennes japonaises réunies. Le Dr Inamori a fait récemment une conférence en France sur l’altruisme à l’EM Lyon, et en Chine il fait régulièrement des conventions devant 30 000 personnes.

J’ai pu rencontrer Arnaud Velthuizen, DG de la filiale Kyocera Document Solution France en 2017. Il m’explique alors que les petits livres rouge, vert et bleu, que chaque employé reçoit en arrivant, regroupent les principes de la philosophie du Dr Inamori et comment les mettre en œuvre. Cette philosophie donne du sens, demande le respect des autres, et fait l’objet d’une lecture en groupe chaque vendredi ou chacun expose des éléments de la philosophie qui le touche. Cela vient de la culture bouddhiste : l’esprit s’élève pour donner du sens. Il y a aussi des séminaires en interne pour parler de la philosophie, en général d’une demi-journée avec des vidéos du Dr Inamori.

Cette philosophie est mise en action comme la politique RSE qui existe depuis longtemps chez Kyocera, avec la certification ISO 27001, ce qui permet de donner du sens et de contribuer à faire grandir les collaborateurs tout en faisant avancer la société. Le système ÉCOSYS, technologie particulièrement propre pour l’environnement, a été lancé par la branche allemande en 2000. D’un point de vue commercial, les clients sont considérés comme de vrais partenaires avec qui les offres sont co-construites, sur un principe gagnant – gagnant. L’idée est d’éliminer ce qui peut se mettre sur la route de l’objectif final : remporter un marché. Donc cela sert le business et cette philosophie permet de le mettre son travail en action de manière concrète.

Pour les managers des amibes, l’objectif est de repousser les arguments « c’est impossible » et arriver à travailler sur le collectif pour repousser toutes les barrières. Concrètement les amibes se font des refacturations virtuelles entre les services car ce sont des centres de profit. Chaque amibe doit être rentable. Chacun est fier de son résultat, et l’auto contrôle régule. En terme RH, l’entreprise recherche des pionniers qui ont la bonne attitude. Les compétences pourront s’acquérir plus tard. Il faut que le candidat adhère d’abord à la culture : c’est ce qui fédère autour d’une vision. Le dirigeant, lui, doit être un coach, être lui-même accompagné et rester en lien avec la réalité en voyant chaque semaine des clients. Selon lui, un leader doit être exigeant avec lui-même et avec ses collaborateurs, il doit les protéger de la peur et leur apporter des compétences. L’entreprise, sur un marché extrêmement concurrentiel, est en croissance constante depuis plus de quinze ans. 

Faut-il en conclure que l’entreprise libérée est un concept galvaudé, une idée qui appartient déjà au passé ?

Car oui, cela fait quelques décennies déjà que cette tendance existe…

Mais pour autant, à l’échelle du temps « humain », certains concepts ne sont-ils pas d’éternels renouvellements ?

On parle beaucoup d’accélération du changement, liée notamment aux progrès technologiques récents… mais Héraclite ne disait-il pas déjà en l’an 500 avant J.C. « Il n’y a rien de permanent, sauf le changement ? »  

Et Socrate en 400 avant JC argumente « Il vaut mieux obéir aux lois qu’aux hommes, je défends la souveraineté et l’autonomie de la raison : si le « daimonion » m’avais donné un ordre que j’aurais estimé contraire à la raison, j’aurais refusé d’obéir. » Cela peut être interprété comme « des règles du jeu ou une constitution valent mieux que le pouvoir éclairé de quelques dirigeants », un des fondements de l’entreprise libérée ? 

 

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Et le management dans tout ça ? 

Dans les entreprises opales, le management n’a pas forcément disparu. Mais il est réparti un petit peu partout (par subsidiarité) au lieu d’être centralisé aux mains de gens débordés qui n’ont qu’une vision biaisée de la réalité. Et tout le monde n’est pas sur un pied d’égalité, car l’essentiel n’est pas d’arriver à un équilibre des pouvoirs ou de créer des contre-pouvoirs, mais plutôt de donner à chacun le leadership qui lui est nécessaire pour développer pleinement son potentiel. Dans un écosystème, une fougère et un champignon ne sont pas aussi haut que l’arbre juste à côté, mais ils coopèrent pour survivre. 

Quelques règles de fonctionnement des entreprises opales :

  • Rôles. Des rôles élémentaires fluides sont établis à la place de descriptions de poste figées.
  • Prise de décision : elle se fait au travers d’un processus de sollicitation d’avis ou par consentement par le traitement des objections comme en sociocratie ou holacratie.
  • Gestion de crise : la communication est transparente. Tout le monde est impliqué pour faire émerger la meilleure réponse possible via l’intelligence collective. 
  • Achats et investissements : chacun peut engager n’importe quelle dépense dans ses rôles, sous réserve d’avoir sollicités les avis des personnes expertes ou impactées et d’en endosser la responsabilité vis-à-vis du reste de l’entreprise.
  • Transparence : toute l’information est accessible à tous en temps réel sur tous les sujets, y compris les finances et les rémunérations.
  • Attribution des rôles : il n’y a pas de « promotion ». Une attribution des rôles est réalisée par un processus d’élection sans candidat par exemple. 
  • Gestion de la performance : l’accent est mis sur la performance collective, l’évaluation des performances individuelles est faite par les pairs, par évaluation des résultats des rôles inscrites dans les redevabilités.
  • Rémunération : l’auto-évaluation peut permettre de fixer le niveau de salaire par péréquation avec les autres salaires pour un écart de salaires minimisé. Il n’y a pas souvent de primes et le partage des bénéfices se fait si possible de façon concertée.

Selon Sébastien Henry, coach, écrivain et conférencier, qui est particulièrement en accord avec les propositions de Frédéric LALOUX, trois critères sont essentiels pour réussir cette approche :

  • Les équipes sont autonomes, pluridisciplinaires, et prennent la plupart des décisions.
  • Les collaborateurs ne se restreignent pas à un rôle dans l’entreprise. Ils disposent ainsi d’énergie et de créativité.
  • Les collaborateurs filtrent les décisions selon leur pertinence et leur cohérence avec la mission de l’entreprise.

Est-ce pour autant la fin du management comme le dit Gary HAMEL ? Au-delà du titre provocateur, ce « pape » moderne du management explique plutôt qu’il est temps de réinventer le management pour libérer l’innovation managériale.  « Pour la première fois depuis l’ère industrielle, la seule manière de construire une entreprise adaptée à l’avenir, c’est de faire en sorte qu’elle soit adaptée aussi aux hommes et aux femmes qui y travaillent ». Et le choix n’est pas à faire entre des organisations « avec » ou « sans » managers, mais plutôt pour des entreprises où ne travaillent que des personnes prenant des initiatives, responsabilisées, bref des « leaders ». Les autres seront un jour ou l’autre remplacés par une intelligence artificielle. 

Mais quel type de leaders ? Pour Gérald KARSENTI, le glas a sonné pour les leaders narcissiques égocentrés laissant la voie aux leaders non dominants, ayant un esprit créatif, une exemplarité irréprochable, une certaine dose d’humilité, un véritable esprit collaboratif, une capacité à déléguer, une aptitude à donner du sens, et ayant une démarche centrée sur les clients et l’humain. Et selon lui, les femmes répondent particulièrement bien à cette description, qui gèrent leur ego d’une façon différente, ne cherchant pas la confrontation, mais ne renonçant pas facilement non plus à un objectif, laissant les autres grandir et favorisant ainsi la coopération.

En conclusion, je citerai Isaac ASIMOV, toujours autant d’actualité 50 ans après ses nombreux romans de science-fiction qui ont inspirés beaucoup de créations cinématographiques comme Star Wars, Dune, Blade Runner ou I, Robot… qui nous rappelle que mettre l’Humain, la confiance et l’intelligence collective au centre des organisations n’est sans doute pas une mauvaise idée…

« Il faut garder la foi en notre vieux cerveaux d’Homme ! Notre plus grande richesse, c’est notre génie créateur. » Le Cycle des robots, tome 3, Les cavernes d’acier.

 

Sources : 

12 Frédéric Laloux, « Reinventing Organizations : des communautés de travail inspirées », 2015

13 Duc Ha Duong témoigne lors du Club “Human Organization of Work”, Bpifrance, 5/07/2017

14 Christophe Baillon lors du Club “Human Organization of Work”, Bpifrance, 5/07/2017

15 Yves Cavarec, « L’entreprise du vivre ensemble », Harmattan, 2016

16 Kazuo Inamori, « Amoeba Management », De Boeke, 2014

17 Kazuo Inamori a reçu le prix PhD Honoris Causa à EM Lyon le 7 mai 2015

18 Interview de Arnaud Velthuizen, KDSF, Gif-sur-Yvette, 13/04/2017

19 Sébastien Henry, « Ces décideurs qui méditent et s’engagent », Dunod, 2014

20 Gary Hamel, « La fin du management », Vuibert, 2008

21 Gérald Karsenti, « Leaders du 3ème type », Eyrolles, 2016

Photo de couverture : Quang Anh Ha Nguyen provenant de Pexels

 

En savoir + : 

Lire la partie 1,

Lire la partie 2.

Les managers sont-ils vraiment prêts à jouer le jeu de l’entreprise libérée ?

 

La promesse de l’entreprise libérée ? Rendre l’entreprise plus performante avec des employés libérés de la hiérarchie et du contrôle. On parle aussi d’entreprise «  pourquoi » parce que l’essentiel est l’objectif, pas les moyens mis en œuvre pour l’atteindre. Concrètement, le phénomène de l’entreprise libérée nous confronte aux limites du modèle de l’organisation verticale, et aux réticences des dirigeants et managers à lâcher le contrôle.

Mais comment fonctionnent concrètement les entreprises libérées ?

L’entreprise libérée est basée sur la responsabilisation des collaborateurs de tous niveaux, qui passe par une grande autonomie et la modification du rôle des managers. Les collaborateurs sont autonomes au sein de petites équipes qui gèrent pour une clientèle donnée l’ensemble des processus. Ils s’appuient sur un cadre très explicite et transparent, des règles du jeu co-construites et respectées par tous, soutenus par des coachs et ils reçoivent régulièrement des formations pour monter en compétence, pour avoir la capacité de décider de la meilleure façon d’organiser leur travail.

Le prérequis de l’entreprise libérée : une vision partagée par tous les salariés, une raison d’être de l’organisation qui leur permettra d’atteindre le but commun en le comprenant bien. 

Résultats : des équipes beaucoup plus engagées car impliquées dans les décisions et dans l’organisation de leur travail. Il en résulte une performance sociale accrue (moins d’arrêts maladie, de burnout, de grève…) et économique. En effet les salariés étant directement au contact des clients et libres de leurs décisions, ils sont beaucoup plus adaptables et savent répondre aux exigences clients sans passer par leur hiérarchie. Les clients sont satisfaits, les produits adaptés et de qualité, et les ventes et les performances augmentent.

Deux exemples sont parlants : 

  • FAVI qui fabrique des pièces pour les boîtes de vitesse dans l’automobile en Picardie a mis en place des mini-usines, de petites équipes libres et autonomes formées aux processus de vente, communication, recrutement… et sur un marché hyperconcurrentiel de l’équipement automobile… est devenu le leader européen dans son secteur, qui exporte même en Chine !
  • SOL qui réalise des prestations de nettoyage industriel en Finlande réalise 15% croissance par an depuis 22 an !

Selon Ludovic Cinquin, du cabinet de conseil Octo Technology (Accenture), les principaux points clés d’une transition culturelle entre une entreprise traditionnelle et une entreprise libérée : un leader inspiré, la transparence, l’authenticité, l’autonomie et le droit à l’erreur. Ce sont d’ailleurs les piliers culturels d’entreprises nées avec le numérique comme Netflix (Reed Hastings), Blablacar (Frédéric Mazzella) ou Facebook (Mark Zuckerberg).

 

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L’entreprise libérée : une solution miracle ?

L’entreprise libérée serait-elle la solution miracle à tous les dysfonctionnements que l’on constate dans la plupart des entreprises et organisations calquées sur le modèle bureaucratique et hiérarchique ? 

Cette réponse serait simpliste, car les ingrédients, les conditions de réussite de ce modèle, reposent sur des choix que peu de dirigeants acceptent de faire, car ils mettent en jeu les attributs du pouvoir qui sont encore ceux de la société actuelle. « Se défaire de son égo est une chose extrêmement compliquée pour un manager ou un dirigeant, et cela nécessite de faire un grand travail sur soi. Néanmoins, ceux qui sont passés à l’acte et s’y sont tenus en ont récolté les résultats. ». Mais la mise en œuvre d’une entreprise libérée est complexe, tant cela représente un changement radical de paradigme. 

Pour Gilles VERRIER le terme est trompeur : libérer l’entreprise doit être en mouvement permanent alors que le nom « entreprise libérée » paraît statique. Car il est important de se focaliser sur l’élimination des obstacles entre les collaborateurs et l’objectif à atteindre. 

Mais la responsabilité se décrète-t-elle ? Comment faire adhérer les collaborateurs qui ont toujours appris à obéir et ne pas prendre de risques ? 

D’ailleurs, un autre souci est le concept même de leader libérateur et ses limites structurelles. Que faire si on n’en a pas ? Enfin, il y a la problématique réelle du : « Comment embarquer les managers ? »

Il est essentiel de développer un leadership fort chez les personnes qui tiennent les rôles. Le leadership, s’il se répand dans l’organisation, va permettre à chacun d’assumer ses rôles et sera un facteur puissant de résilience de l’entreprise. 

Mettre en place des organisations moins pyramidales, accompagnées d’un changement de style de management ne s’improvise pas. L’origine des entreprises libérées est souvent l’apparition d’une crise et d’un leader qui offre plus de liberté en échange de plus de responsabilité et co-construit la raison d’être de l’organisation, puis transfère le leadership aux employés en laissant naître des leaders naturels. Ce changement de paradigme ne peut se réaliser sans la volonté, l’énergie et le charisme de leaders, et sont souvent initiées par le dirigeant à l’image de Jean-François Zobrist (FAVI), Liisa Joronen (SOL) ou Vineet Nayar (HCLT). 

 

Les raisons :

La vision, le but commun ou la raison d’être d’une entreprise sont souvent le précarré des dirigeants, même s’ils décident d’en partager les choix et la mise en œuvre.

La mise en place d’une nouvelle organisation passe par une nouvelle gouvernance, de nouveaux processus de décision, encore une fois l’apanage du comité exécutif.

– Toute tentative de libération ou de changement de style de management échouera si les dirigeants s’opposent dès la moindre contrainte ou si les résultats n’arrivent pas assez vite.

Emmener les managers dans un changement qui va leur faire perdre leur pouvoir tel qu’ils le perçoivent est un risque réel s’il n’est pas accompagné correctement.

 

Le président du Ministère Belge de la Santé Publique, de la Sécurité Alimentaire et de l’Environnement, Frank Van MASSENHOVE, témoigne de la libération de son périmètre : « La majorité de mes collègues qui dirigent une administration comme la mienne trouvent que le processus que j’ai engagé est dangereux… pour leur statut personnel. Ils veulent demeurer le chef parmi les chefs. Nous avons cassé cette chaîne hiérarchique et les agents sont désormais agiles, ils s’auto-organisent et ils travaillent mieux comme cela. La productivité de nos 1 000 agents a augmenté de 81 % en dix ans. »

D’autres entreprises renouent avec le succès, parce que libérées. Il en est ainsi de la PME française Chrono Flex, dont le redressement est relaté dans le livre de son fondateur Alexandre GERARD « le patron qui ne voulait plus être chef », désormais animateur du groupe « Inov’On ».

 

Sources : 

4 Ludovic Cinquin, « De l’entreprise digitale à l’entreprise libérée », USI, 27/01/2016

5 Interview de Hakim Haïkel, Directeur Général du SIAV qui est passé en Holacracy en 2017

6 Gilles Verrier, Nicolas Bourgeois, « Faut-il libérer l’entreprise ? », Dunod, 2016

7 Jean-François Zobrist, « La Belle Histoire de Favi », 2014

8 Muriel Jasor, « Liberté et performance, un duo gagnant », Les Echos, 07/02/2012 

9 Vineet Nayar, « Comment renverser les règles du management », 2011

10 Frank Van Massenhove, « Libérer une administration », acteurspublics.com, 6/10/2017

11 Alexandre Gérard, « Le Patron qui ne voulait plus être chef », Flammarion, 2017. 

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Fondements et principes : posons les bases d’une entreprise libérée

 

L’entreprise libérée consiste à supprimer au maximum les hiérarchies. La fonction de manager est quasi inexistante et chacun, responsable de son poste, travaille à atteindre son objectif en pleine autonomie et en collaboration avec son service ou son équipe. Le courant de l’entreprise libérée a été popularisé par le professeur Isaac Getz en 2009, mais le concept existant bien avant. De tout temps, les entreprises ont cherché un nouveau mode organisationnel. Dans cette première partie, Cyril Ogée tente de définir le courant de l’entreprise libérée. 

Quelle définition peut-on donner à l’entreprise libérée ?

La tendance médiatisée il y a une dizaine d’années, dite des « entreprises libérées », décrite par Isaac Getz, professeur à l’ESCP Europe, dans son fameux livre « Liberté et Cie » co-écrit par Brian M. CARNEY en 2009, est-elle déjà galvaudée ? Plutôt que de libérer l’entreprise, Isaac Getz parle d’ailleurs plutôt de libérer les collaborateurs du cadre hiérarchique contraignant pour qu’ils soient engagés et responsabilisés, et le titre original l’illustre bien : « Freedom Inc.: Free Your Employees and Let Them Lead Your Business ».

Il explique comment des dizaines d’entreprises ont réussi en responsabilisant leurs employés, en leur faisant confiance et en leur laissant une très grande autonomie de décision : les salariés sont libres et responsables d’entreprendre toutes les actions qu’ils estiment les meilleures pour l’entreprise, en fonction des rôles qu’ils tiennent. 

Les entreprises libérées fonctionnent avec peu de hiérarchie, partagent la gouvernance et le leadership entre tous les collaborateurs. L’autonomie est le maître mot pour laisser ceux qui savent et ont l’expertise décider de la meilleure action à entreprendre. La compétence, et donc la formation et la bonne répartition des rôles entre les personnes, sont des éléments clés pour rendre l’autonomie possible. Et pour faciliter les décisions dans ses rôles, le “pourquoi” ou le but de l’organisation permet de filtrer les priorités, de contribuer à la raison d’être ou mission de l’organisation. 

L’absence de manager omniscient (au sens traditionnel du management du XXème siècle) oblige chacun à s’engager envers tous ses collègues (en étant redevable dans ses rôles) et non plus seulement vis-à-vis d’un(e) chef(e). On passe alors de la collaboration en silos à la coopération, ou la co-construction, afin d’atteindre les objectifs permettant de donner vie à la mission commune. Les entreprises ayant un management traditionnel et pyramidal fonctionnent généralement avec un budget, une planification, des processus et des procédures expliquant comment précisément faire son travail. Cette organisation taylorienne – structurée en niveaux hiérarchiques – est issue des révolutions industrielles, avec une bureaucratie importante et des décisions prises en haut de la pyramide, et descendant en cascade sur les managers de proximité. Les collaborateurs sont vus comme des exécutants, la direction décidant pour eux et demandant aux managers de faire appliquer les directives et de contrôler les résultats. C’est une approche assez infantilisante, qui engendre l’absence d’engagement et une démotivation grandissante de tous les salariés.

De nouvelles approches plus « responsabilisantes » libèrent les collaborateurs et les placent sur un pied d’égalité (ou d’équivalence), encouragent le travail collaboratif. Elles impliquent une écoute mutuelle, permettent aux personnes de mieux s’épanouir en étant considérées comme des individualités et non juste les « ressources humaines ». Les équipes sont ainsi plus facilement motivées, impliquées, loyales, et bien plus efficientes. Les personnes étant à la bonne place (compétences, autonomie dans leurs rôles, adéquation avec les valeurs de l’organisation ou de l’équipe) … Finalement, les personnes sont plus alignées entre ce qu’elles font et ce qu’elles sont (wholeness). Cet engagement de chacun permet une plus grande création de valeur, et de meilleurs résultats économiques pour l’entreprise. 

 

Quelles entreprises se sont libérées ?

En France et en Belgique, des entreprises comme la MAIF, Auchan, Kiabi, Leroy Merlin, Décathlon, Leclerc Rochefort, Airbus, Orangina, Michelin, AxaBanque, BNP-Parisbas, Critéo, AccorHotels, La CPAM des Yvelines, La Commission Européenne, le Ministère Belge de la Mobilité et des Transports, le Ministère Belge de la Santé Publique et de l’Environnement, ChronoFlex (Groupe Inov’On), Lippi, Biose, Poult, Arca, Favi, Sol, Richard Group, le Syndicat Interprofessionnel de l’Assainissement de Valenciennes, Dynalec et bien d’autres encore se déclarent engagées dans cette approche. Selon Fabrice AUDRAIN, PDG de Dynalec, « en entreprise libérée, on ne perd pas le contrôle : on le partage ».

Jean-François ZOBRIST, ancien directeur général de FAVI, a développé toute une méthodologie remarquable sur le management et la qualité, particulièrement efficace puisqu’elle a permis à l’entreprise de devenir leader sur son marché en dépit de circonstances difficiles. Cette méthodologie de management par la qualité constitue par elle-même une quasi-encyclopédie du management et de la qualité, écrite avec une vision d’efficacité opérationnelle et de rentabilité.

Selon lui, « Le management est une forme de laisser faire pour faire en sorte que les choses se fassent d’elles-mêmes. » et « Le bonheur au travail c’est savoir pour quoi et pour qui on travaille. Et être libre du comment. ». 

Toujours selon Jean-François ZOBRIST, l’entreprise libérée n’est pas une mode, c’est un passage obligé. Depuis 50 ans en Occident on est dans un cycle « production-consommation » et on ne sait plus pour quoi on travaille, on est malheureux. « Or ce cycle est fini, le marché de masse n’existe plus… Nous ne vivons pas une crise mais une fin de cycle. Il faut inventer le prochain cycle et l’entreprise libérée en fera partie. »

 

Les principes de l’entreprise libérée : la confiance !

L’entreprise libérée invite chaque organisation à faire du sur-mesure sans aucun schéma préétabli. Celle-ci peut, selon ses besoins, adapter librement une philosophie qui se fonde sur la conviction que l’Homme est digne de confiance. Le concept désigne une organisation caractérisée par un respect des collaborateurs considérés comme des adultes pleinement responsables. Comme l’explique Isaac Getz dans ses livres, c’est une forme organisationnelle dans laquelle les salariés sont totalement libres et responsables dans les actions qu’ils jugent bon d’entreprendre. Cette approche pose comme postulat de départ que la théorie Y de Douglas McGregor (pour rappel, l’Homme aime le travail et les responsabilités, et n’a pas besoin d’être contrôlé) est avérée. Elle prône comme valeur fondatrice la confiance en l’Homme et l’intelligence collective. Ce qui est paradoxal quand on constate que la direction des entreprises prend comme prérequis le fait que les collaborateurs lui fassent confiance, en quoi l’inverse devrait-il être différent ? Les avantages : c’est un système qui donne du sens au dirigeant et aux collaborateurs, en les impliquant dans la vision et les projets, ce qui permet de ne pas « manager pour les 2 à 3% de personnes qui auraient tendance à abuser de la confiance ». Comme le dit Isaac Getz dans une publication :

« Faire confiance » : utopiste ou réaliste ?

Dans les entreprises, on appelle parfois ceux qui font toujours confiance aux salariés « les utopistes » et ceux qui contrôlent toujours « les réalistes.« 

Mais si on tient compte des observations que seuls 2 à 3% des salariés abusent de la confiance qu’on leur donne, ne devrait-on pas appeler ceux qui font confiance et se reposent sur l’autocontrôle les réalistes, et ceux qui dépensent de larges sommes et efforts pour contrôler des utopistes ? » 

 

Les principes de l’entreprise libérée : satisfaire les besoins universels !

Le modèle de l’entreprise libérée est centré sur l’analyse des besoins universels des êtres humains, à savoir :

Le besoin intrinsèque d’égalité ou d’équivalence et sa traduction dans le monde du travail par le respect, la considération, la confiance, la bienveillance, la prise d’avis croisée. La satisfaction de ce besoin d’égalité implique que l’organisation considère les collaborateurs comme des êtres doués d’intelligence, capables de réfléchir et d’agir par eux-mêmes, tels qu’ils le sont par ailleurs dans la société en tant que citoyens capables de choisir démocratiquement leurs représentants.

Le développement personnel, qui se traduit par le besoin d’apprendre et de progresser. La satisfaction de ce besoin passe par la mise en place d’actions proactives en matière de formation et de signes de reconnaissance par les pairs et l’organisation.

L’auto-direction, dont les ressorts remontent à la petite enfance, période durant laquelle l’enfant expérimente et revendique l’autonomie et l’affirmation de soi. La satisfaction de ce besoin implique de la confiance et son corollaire, le droit à l’erreur et sa reconnaissance. Cette confiance accordée contribue aussi de renforcer l’estime de soi, indispensable pour devenir plus assertif dans son métier. 

L’application de ces trois principes dans un certain nombre d’entreprises libérées se traduit par une augmentation de la performance, mesurée notamment par la croissance du chiffre d’affaires corrélée à une augmentation du bien-être des salariés. 

 

Sources : 

1 Isaac Getz, « L’Entreprise libérée : Comment se désintoxiquer des vieux modèles », 2017

2 Isaac Getz, « Quand La Liberté Des Salariés Fait Le Succès Des Entreprises », 2009

3 Gwen Catheline, « Une Scop sur le chemin de la libération », Le Télégramme, 29-07-2017

Photo de couverture : de fauxels provenant de Pexels

 

En savoir plus : 

Lire la 2ème partie,

Lire la 3ème partie.

Tony Hsieh, ancien patron du site de vente de chaussures Zappos, meurt à 46 ans.

 

Par Franck Tourtois :

 

Tony Hsieh est décédé à 46 ans le 27 novembre 2020. Une mauvaise nouvelle de plus à mettre au compte de l’année 2020.

Diplômé de Harvard, ce fils d’immigrants taïwanais a fait fortune à la fin des années 90 en revendant sa première entreprise à Microsoft pour 265 millions de dollars. En 2009, il revend Zappos (un dérivé du mot espagnol zapato, « chaussure ») à Amazon pour 1,2 milliard de dollars, l’entreprise réalise alors environ 1 milliard de dollars de recettes.

Il y a quelques années, Cyril m’a fait lire « Delivering Happiness », l’autobiographie de Tony Hsieh. J’ai, comme beaucoup, été marqué par ce qu’il y avait écrit dans ce livre.
Bien entendu il était un entrepreneur assez exceptionnel, ayant commencé à avoir des idées pour monter des business à un âge très précoce. Au cours de sa vie, il a su prendre des risques, écouter ses intuitions, croire en ses idées, et a essayé de redonner vie à un quartier plutôt pourri de Las Vegas (il a investi 350 millions de dollars de ses deniers personnels pour revitaliser le centre-ville historique) tout en donnant les moyens aux employés de sa boite qui le souhaitaient de créer leurs propres entreprises. Il voulait avoir un impact positif sur la communauté.

 

D’aucuns trouveront des choses à redire quant à ce qu’il a fait au cours de sa carrière, surtout parmi ceux qui n’ont jamais créé d’entreprise ou ne sont jamais sortis des sentiers battus professionnels. D’autres – qui l’admiraient – regretteront qu’il n’ait pas fait encore plus, et diront que lors des 10 dernières années il s’est surtout contenté de profiter de ses acquis.

Il est facile de critiquer…

Chaque année, 30 000 personnes postulent pour rejoindre l’entreprise, pour 300 places seulement. Les faits sont là.

Pour ma part, je retiens de son exemple que l’on peut être un patron qui dure. Certes il a eu de bonnes idées, il a créé quasiment de toutes pièces une boite qui a vraiment mis le client au centre – lisez le livre, il y figure un paquet d’anecdotes savoureuses à ce propos, l’entreprise était d’ailleurs basée à Las Vegas depuis 2013, car c’est une ville qui a l’esprit du « service au client » – mais ce n’est pas ce qui m’a le plus impressionné. Il est resté plus de 20 ans le directeur de Zappos, parlant à tous les employés régulièrement, communiquant notamment par mail généraux pour partager idées, réactions et émotions, allant travailler dans chaque département, restant central, mais toujours capable de donner de la place aux autres. Il écoutait apparemment réellement les idées des collaborateurs et savait valoriser les initiatives individuelles et collectives. 

Il est parvenu à ne pas devenir un goulot d’étranglement. 

Il avait sans doute un fort ego, mais cet ego n’est jamais devenu si important qu’il ait fait réellement de l’ombre à l’entreprise.

Je connais quelques patrons d’entreprises. J’en vois certains dans leur quotidien et je peux vous garantir que, ce que Tony Hsieh parvenait à faire la plupart du temps, fait transpirer tous les chefs d’entreprise de ma connaissance. C’est une raison pour laquelle avec admiration, respect et candeur nous proposons de les soutenir dans la mise en œuvre des évolutions nécessaires à la survie de leur entreprise. 

 

 

Commentaire de Cyril sur mon article :

 

Je partage avec Franck une grande admiration pour Anthony Hsieh. Pour ma part, c’est son côté visionnaire et sa volonté d’émanciper les salariés de son entreprise qui m’impressionnent. En particulier sa volonté de renouveler la façon dont son organisation fonctionnait pour donner plus d’autonomie et de sens à ceux qui travaillaient chez Zappos.

Il expliquait qu’il souhaitait rendre son entreprise plus résiliente en conservant l’agilité d’une start-up et lutter contre les effets néfastes de la « bureaucratie ». Il s’est inspiré d’une étude montrant que chaque fois que la population d’une ville double, la productivité par habitant augmente de 15 %. Quand une entreprise double en taille, le phénomène inverse se produit. Comment donc s’inspirer de l’organisation d’une ville qui n’est pas structurée avec une hiérarchie mais auto-organisée avec des habitants, commerçants, entreprises, services publics, sociétés de transport, etc… Avec ses 1 500 salariés, il a mis en place il y a 5 ans une Holacracy™, un modèle d’organisation du travail, déposé en 2007 par son inventeur, l’américain Brian Robertson, et structurée en holarchie (du grec holons, « le tout ») et non plus en hiérarchie. Ce modèle s’inspire de certains principes de la sociocratie, une méthode de gouvernance dynamique initiée par Gerard Endenburg aux Pays-Bas dans les années 1970.

Le fonctionnement de l’entreprise est basé sur la raison d’être évolutive de l’organisation (un peu comme une entreprise à mission), sur l’émancipation des salariés par leur épanouissement (on parle de plénitude) et par l’auto-organisation des équipes ou « cercles ».

L’entreprise fonctionne avec des cercles autonomes qui ont leur raison d’être et les ressources nécessaires pour assumer leur mission. Au sein du cercle, les personnes ont des rôles qui ont aussi une raison d’être déclinés sur celle du cercle, et des résultats à atteindre dont ils sont redevables envers toute l’organisation. Ces rôles sont donc associés à des responsabilités pour lesquelles les personnes ont autorité sur leur périmètre. Des rôles sont aussi assignés pour la gouvernance du cercle (animateur de réunion, rédacteur – toutes les décisions sont transparentes et explicites dans le logiciel collaboratif – responsable de la stratégie, des compétences et du budget, responsable de la négociation avec les autres cercles, etc…).

« Bien que Tony ait pris sa retraite l’été dernier, nous savons à quel point il a eu un impact énorme sur Zappos, car il a consacré les 20 dernières années à se concentrer sur le succès de l’entreprise et de ses employés », a déclaré l’actuel PDG de Zappos, Kedar Deshpande, dans un message posté sur la page d’accueil de l’entreprise.

Dans une déclaration à Forbes, le frère de Tony Hsieh, Richard, a déclaré : « Il n’y a pas d’humain qui ne soit tombé amoureux de l’humanité de Tony, c’est pourquoi tant de gens ont le cœur brisé. »

Inamori : une figure inspirante du leadership

Cette approche révolutionnaire est réellement une approche pionnière en la matière, puisqu’elle existe depuis des décennies… et a fait ses preuves !

Récemment, j’étais interpellé lors d’une conférence où j’intervenais sur les thèmes de la gouvernance partagée, notamment sur les modèles d’autogestion, et du management au 21ème siècle. La personne me demande : « selon vous, quel sera le modèle dominant dans le 20 prochaines années ? »

Kazuo Inamori

Inamori : de créateur d’entreprise, à gourou du management

 

Si vous aviez posé la question il y a 60 ans à Kazuo Inamori, sans doute aurait-il répondu que le siècle suivant verrait une forte évolution dans les modèles de management. Dès les années 1960, le Dr. Inamori met en place dans sa PME un système utilisant un modèle d’amibes autogérées (voir son célèbre ouvrage « Amoeba Management » et plus récemment « a passion for success »). Même si des milliers d’entreprises disent s’inspirer aujourd’hui de ce modèle, force est de constater que ce n’est pas encore le modèle dominant.

Kazuo Inamori est un jeune ingénieur dans les années 50 quand il fonde en 1957 une PME basée sur la technologie de la céramique « Kyoto Céramique » qui deviendra Kyocera, entreprise d’envergure mondiale qui compte aujourd’hui 100 000 employés et réalise un chiffre d’affaire de 50 milliards d’euros. Il se rend compte que sa petite entreprise pourrait gagner en efficacité si les salariés décidaient au lieu de toujours venir demander au patron alors que souvent ils savaient mieux que lui quoi faire…

Il décide donc rapidement de créer des cellules ou « amibes » inter-indépendantes mais autonomes afin de permettre à ces cellules de décider en fonction de la stratégie et des objectifs de l’entreprise mais aussi selon des relations client-fournisseur internes. Chaque amibes a ses propres objectifs de rentabilité mais doit aussi permettre à l’entreprise de gagner sur ses marchés.

Il crée aussi rapidement une philosophie qui permet d’ancrer dans chaque décision des éléments de la culture et des valeurs de l’entreprise. Cette philosophie est le ciment de l’organisation en régissant les actes et les interactions entre les membres de l’entreprise. 40 ans après sa création elle est toujours rappelée par des réunions hebdomadaires qui reprennent la philosophie du groupe : « la mission de Kyocera est de  » faire ce qui est juste en tant qu’être humain « , un concept intégré dans toutes les décisions. En montrant l’importance de l’équité et de l’effort, il sert de paradigme pour la conduite des salariés ». Ces valeurs humanistes et ce mode de gestion à long terme ont été les clés d’une réussite économique qui fait aujourd’hui école dans le monde entier.

Inamori-san reading

Kazuo Inamori : une vision et une méthode toujours d’actualité

 

Il est intéressant de détailler la méthode de Kazuo Inamori, car malgré son ancienneté elle est toujours d’actualité pour aider les entreprises à passer d’un management hiérarchique traditionnel à un mode de gouvernance distribué basé sur le principe de subsidiarité et non uniquement sur un lien de subordination.

Les fondements de ce management repose sur trois principes fondateurs :

  • le profit est un moyen de réussite mais pas une fin en soi.
  • Sans autonomie et responsabilités des salariés l’entreprise ne peut fonctionner de manière optimale.
  • Le ciment de l’entreprise est scellé par des valeurs communes partagées et vécues au quotidien par tous, dans toutes les relations entre salariés, avec les clients, mais aussi avec les fournisseurs.

Ces valeurs sont :

  • La dignité
  • Le respect
  • L’équité
  • La justice
  • L’honnêteté

Ces valeurs ne servent à rien si elles ne sont pas incarnées dans des comportements mis en œuvre chaque jour par les salariés :

  • Être exemplaire (à commencer par le dirigeant lui-même) au quotidien, et faire preuve de transparence : communiquer intensément sur ses intentions.
  • Comprendre que la réussite de l’entreprise passera forcément par l’adhésion de chacun aux valeurs communes.
  • Ces valeurs doivent être un filtre décisionnel, même pour les grandes décisions
  • Faire des ateliers participatifs qui rassemblent toutes les catégories d’employés, pour partager les valeurs et co-élaborer la philosophie de l’entreprise.

Le souci sincère du développement des personnes au sein d’une entreprise est une véritable clé de succès si on y associe toute l’entreprise, et que toutes les décisions, quotidiennes comme stratégiques, sont être ancrées dans ces valeurs.

Inamori-san & JAL

Le sauvetage de la Japan Airlines

Le succès de Kazuo Inamori a été tel, qu’il y a quelques années, alors qu’il était déjà à la retraite, le gouvernement japonais lui a demandé de diriger et de sauver Japan Airlines (JAL) de la faillite. Ce qu’il à fait… En 2010, il emploie une méthode de management d’une simplicité et d’une efficacité redoutables : la responsabilisation. A peine arrivé aux commandes de la JAL, il a divisé ses effectifs en petites équipes autonomes, responsables de leur budget et de leurs objectifs. Autrement dit, il a remis le principe de subsidiarité au coeur du fonctionnement de l’entreprise. Dans un deuxième temps, il a mené tout un travail sur les valeurs selon la démarche évoquée précédemment. Résultat : En trois ans, Inamori a sauvé la JAL de la faillite et l’a faite renouer avec les bénéfices.

Depuis, d’autres initiatives ont eu lieu sur plusieurs continents. Isaac Getz dans son livre « Liberté et Compagnie » puis « L’entreprise altruiste » et Frédéric Laloux dans « Reinventing Organisations » en donnent des dizaines d’exemples. 

Par Cyril OGEE – cogee@acmentoring.com

 

Pour aller plus loin :

Coluche et l'esprit d'équipe

Contrairement à ce que disait Coluche dans son sketch sur les sportifs, l’esprit d’équipe n’est pas un esprit partagé entre tous les membres l’équipe mais plutôt l’opposé : l’action de coopérer qui permet de catalyser et de décupler les esprits et donc les résultats individuels. Voici un post qui met en lumière les raisons pour lesquelles il est devenu indispensable de favoriser l’intelligence collective aujourd’hui et les principales techniques de coaching d’équipe utilisées.

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