La colère est mauvaise conseillère.

J’animais le mois dernier un groupe de travail d’une demi-douzaine d’individus au sein d’une très active et efficace structure d’aide aux cadres sans emploi. Cadres expérimentés, ils participaient à l’atelier de façon contributive, ouverte, polie. Ils jouaient le jeu.
Soudain l’un d’eux, Mr W, homme sans doute très respectable et de fort bonne compagnie en toute occasion, j’en suis certain, se met en tête de me faire passer un très mauvais quart d’heure. Il me contredit systématiquement sans justifier ses arguments ni citer ses sources, et monopolise la parole. Il s’emporte contre les entreprises et leurs dirigeants: ils sont d’un immobilisme stupide et économiquement dangereux puisqu’ils ne voient pas à quel point ils se privent de cadres de valeur, comme ceux presents autour de la table.
Même si sa véhémence choque les participants, aucun d’entre nous n’est véritablement en désaccord avec son propos.

Je connais ce sentiment de frustration et de colère: il saisit assez souvent les personnes que je soutiens dans leurs transitions.

Comment ne pas enrager devant ces processus de sélection qui:

  • multiplient les entretiens (en ce moment mes « ouailles » en passent en moyenne 4 par recrutement -sans compter l’éventuel cabinet de recrutement),
  • additionnent les interlocuteurs (en moyenne 5 salariés de l’entreprise y participent),
  • vous font rencontrer jusqu’à parfois 4 niveaux de responsables hiérarchiques et minimum deux car pas un chef ne semble capable de décider sans son chef,
  • durent entre le premier entretien en entreprise et le dernier cette année jusqu’à 4 mois, alors qu’il fallait 4 semaines fin 2007?

J’avais deja beaucoup de mal a rester calme lorsque j’étais chasseur de tête et que mes clients me « demandaient » deux ou trois nouveaux candidats, alors qu’ils en avaient déjà vus 5 et retenus un ou deux comme « potentiellement acceptables ».

Je suis toujours incapable d’expliquer à Mme X pourquoi cette belle banque, après qu’elle en aie rencontré le directeur commercial, le directeur de business unit et le DRH en deux semaines, lui demanda d’aller passer 6 heures de test et de simulations auprès d’un cabinet d’évaluation (où elle dut expliquer le poste auquel elle candidatait et qui elle avait rencontré jusque lors). Puis ne lui donna plus de nouvelles pendant 6 semaines. Puis lui demanda de revenir voir le DRH. Puis ne lui donna plus de nouvelles pendant plus d’un mois. Puis lui demanda d’aller voir un cabinet de recrutement. Dont le président lui expliqua en la recevant qu’il était mandaté pour fournir une short-list complémentaire de 3 ou 4 candidats et qu’il avait deux mois devant lui pour ce faire, donc qu’elle ne devait pas s’inquiéter de ne plus avoir de communication pendant ce temps.

Je ne sais pas comment non plus expliquer à Mr Y quel raisonnement économique justifie que cette très discrète mais très bien implantée société de service l’aie rencontré 4 fois (dont un 17 août, lui demandant ainsi de prendre 2 jours sur ces deux semaines de vacances en famille et de faire 1700 km en train). Il a ainsi rencontré son responsable fonctionnel, son responsable hiérarchique et les patrons européens de chacun pour que finalement mi septembre -au bout « seulement » de 3 mois- son potentiel futur manager lui annonce que l’on ne prendrait la décision de recruter éventuellement qu’à la fin de l’année.

Et comment ne pas partager l’amertume de tout ceux que j’accompagne et qui passent plusieurs jours à travailler sur des présentations qu’ils font à leur potentielle future entreprise parfois à plusieurs reprises. Ils expliquent ainsi comment ils s’y prendraient, s’ils tenaient telle ou telle fonction, pour atteindre leurs objectifs. Ils analysent le marché, la concurrence, les tendances, ils proposent des solutions, des changements, des orientations. Et ne sont pas pris, ne sachant même pas si quelqu’un a été pris ou si l’entreprise a seulement ainsi bénéficié de plusieurs heures de consulting gratuit d’autant plus haut niveau qu’il est pratique et immédiatement applicable?

CEPENDANT CE SONT DES FAITS. INAMOVIBLES. INATTAQUABLES. Je sais que plusieurs d’entre vous se sentent suffisamment révoltés pour écrire des lettres (à l’attention du Président de la République, d’élus, du directeur de Pôle Emploi, ou des DG de certaines entreprises… ) dénonçant ses pratiques injustes, peu productives et qui donnent tres mauvaise image. Comme le courroux de Mr W durant mon atelier, elles serviront surtout à vous permettre de « laisser sortir la vapeur ».

MAIS CE NE SONT PAS LES REGLES DU JEU. Car il n’y en a pas. Et c’est la bonne nouvelle. Utilisez donc cette colère, cette rage même parfois: transformez là en énergie, en motivation, afin qu’au lieu de participer à un process de recrutement, vous soyez actif sur 4, 5 ou 6 démarches de front. Afin d’être le plus motivé sur chacun d’eux. Afin que les statistiques en plus de votre envie et de votre préparation soient finalement de votre côté et vous permettent d’aller au bout.

…Et que pourquoi pas comme Mr Z lundi dernier vous puissiez venir travailler avec moi une petite heure -au bout de 11 mois- à remplir une très simple, mais o combien satisfaisante, petite matrice de décision servant à décider laquelle de vos 3 offres vous allez choisir!

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